
Les fiançailles ça parle d’amour, le mariage c’est autre chose.
Un article de Mademoiselle Carpe –
La dernière fois, je t’ai fait part de ma rencontre avec Monsieur Lapin : une longue correspondance, deux rendez-vous, un baiser. Avant de te parler « demande en mariage » (gniii !!), je voulais te partager nos différents échanges préliminaires sur le sujet. Parce que oui, nous en avons beaucoup parlé ensemble, comme nous avons beaucoup parlé d’un certain nombre de choses. C’est qu’on adore parler !
La première fois que nous avons parlé mariage (et bébés)
Si, à la rédaction de cette chronique, je ne me souviens plus précisément de la première fois que nous avons abordé le sujet, Monsieur Lapin me rappelle avec conviction, que j’ai mis les pieds dans le plat au quatrième rendez-vous. [Ajout de M. Lapin : la psy en elle me rétorque que la demande d’enfant était formulée de mon côté dès ma première lettre de prise de contact, entre les lignes – je ne l’avais pas vu comme ça, ni écrit dans cette intention, mais, à la relecture, c’est une interprétation qui se tient.]
A ce quatrième rendez-vous, nous prenions un verre dans le bar d’un hôtel de hipsters. Une vieille à qui ma tête ne revenait pas me regardait en biais. Entre le plat et le troisième mojito, je lui ai demandé s’il pensait se remarier un jour et avoir à nouveau des enfants. Il m’a répondu qu’il « ne fermait pas la porte ».
Ce qui est drôle, c’est que je n’avais jusqu’à présent jamais envisagé de fonder une famille. Tout au plus, j’avais quelques envies passagères lorsque je voyais une pub un peu larmoyante mettant en scène la parentalité. Puis à la pub suivante, j’avais envie d’Haribo c’est bon la vie, et je trouvais vraiment sympa que Carglass répare, Carglass remplace.
Le mariage, c’était un peu pareil pour moi. Parfois, j’avais une fulgurance : je voulais me marier. Cinq minutes après, je voulais entrer dans un monde postapocalyptique avec des zombies et marcher dans les rues avec une hache à la main, un air badass et un gros tatouage « Goldorak est mort » dans le dos.
Pourtant, ce jour-là, je lui ai demandé. Et il a dit oui. Et comme des gamins de maternelles qui se promettent d’être amis pour la vie après avoir fabriqué un énième château de caca, cette demande au hasard de la conversation, sous l’œil méchant de la vieille, a pris le sens d’un pacte sacré. C’était notre croix de bois, croix de fer. Depuis, il était évident que nous allions nous marier.
Le mariage, les fiançailles, de quoi ça parle ?
Je disais, nous en parlions souvent. Ce que je dois préciser, c’est que nous n’en parlions pas nécessairement comme un projet commun dont nous imaginions le décorum, mais plutôt comme un concept qui traverse la vie des hommes et des femmes et que nous voulions saisir. Autant dire, ce qui nous occupait était moins « comment tu vois le mariage de tes rêves » que « mais pourquoi diable les gens se marient-ils ? ».
Rapidement, Monsieur Lapin a fait sienne l’une de mes formules : « Les fiançailles, ça parle d’amour. Le mariage, c’est autre chose ».
Par-là, je voulais dire que la demande de fiançailles (et son acceptation), c’est toujours une déclaration d’amour. Ça dit : je t’aime, je n’ai jamais été aussi bien avec quelqu’un, je voudrais que ça dure. C’est un mouvement de romantisme où le cœur est maître. Là, où pour moi, il n’y a de mariage que de raison. En effet, dans mon idée, le mariage est d’abord et avant tout un partenariat. D’ailleurs, les passages avec un-peu-moins-d’amour sont les plus précieux pour jauger de la qualité dudit partenariat. Parce qu’on est moins aveuglé par les sentiments, on sait un peu mieux si on s’y retrouve.
A Juliette Capulet, je préfère Lizarazu
Prenons un exemple.
Juliette est une très bonne amoureuse. Elle refuse son nom, renie son père, blablabla. En revanche, c’est vraiment une coéquipière en carton. Elle fait croire à son mec qu’elle est morte. Du coup, il se suicide. Quand elle voit qu’il est mort, elle a le seum et elle meurt à son tour. Alors qu’avec un peu de dialogue, Juju et Roro se seraient évités de gagner tout à la fois aux Darwin awards et au record du mariage le plus court de l’histoire de la littérature.
Bref, se fiancer avec Juliette, c’est super romantique. L’épouser, c’est un plan foireux.
Le bon plan ? C’est Lizarazu.
Dans je-sais-plus-quel-match-mais-osef [ajout de M. Lapin : c’était un des matches de la coupe du monde 1998], Zidane est coincé par les joueurs avant. Ça va à toute vitesse. Il va clairement être bloqué par la défense et perdre la balle. Sans regarder le terrain, ni les joueurs, sans même réfléchir, il envoie le ballon d’une petite passe arrière. Et là, Lizarazu la rattrape !
Cette passe montre que les deux joueurs se connaissent parfaitement et savent jouer ensemble. Il y a entre eux une harmonie telle qu’elle se passe de mots. Genre, si Lizarazu avait fait un faux suicide pour pouvoir l’épouser pépouze, Zizou aurait compris le truc et, plutôt que de se foutre en l’air à son tour, il aurait attendu patiemment que son pote se réveille en faisant quelques dribles.
(La fameuse passe à 2’20 : Zinedine Zidane The Maestro Of The Decade HD – Bing video)
Prête à être le Zizou de Monsieur Lapin ?
(Oui, je me compare à Zizou. Sans complexes)
Tu l’auras compris, le mariage n’est vraiment pas une blague pour moi. Tellement pas, que lorsque j’en parlais, c’était toujours de très loin.
Il faut dire, avant Monsieur Lapin, je ne pensais pas trouver mon Lizarazu. Oh, pour trouver des Roméo, j’en ai trouvé et à la pelle. Alors, certes, ça sait voler des tableaux pour la mafia albanaise, réciter l’intégrale du manifeste du parti communiste ou écrire une chanson d’amour et la mettre en musique sur un air d’accordéon. Mais pour les trucs importants, genre séparer le blanc de la couleur dans une lessive, penser au tri sélectif, payer le loyer ou être présent pour mon anniversaire, il n’y avait plus personne. Les Roméo, c’est comme les trampolines. C’est bien pour s’envoyer en l’air cinq minutes, mais après, ça encombre.
Monsieur Lapin, c’est comme un trampoline 2.0. C’est toujours bien pour s’envoyer en l’air, mais ça n’encombre jamais. Il est toujours utile, et sans lui le monde paraîtrait vide et triste. Monsieur Lapin c’est un canapé-trampoline avec le plaid et le chat intégré. Il est fiable, constant, obstiné, d’une grande sensibilité et d’une intelligence rare. Il a assumé avec sourire et plaisir des pans entiers du travail que demande une relation pour devenir un couple.
Forcément, l’inquiétude s’est inversée : si ce n’est pas lui le trampoline encombrant, est-ce que ça veut dire que c’est moi ? Est-ce que je suis à la hauteur ? Suis-je moi-même Zizou ou Juliette ?
Parce que ces conversations profondes et conceptuelles sur le mariage me confrontaient à mes limites et angoisses, je les laissais loin dans leur abysse métaphysique et ne me les formulaient jamais comme un projet concret.
Quand bien même, je me suis retrouvée pacsée et fiancée, j’ai fait ça comme une Juju au balcon : ça parlait de l’amour que je lui portais, moins de ce que je me sentais capable d’engager dans une relation très long terme. C’est comme ça que je me suis retrouvée, plusieurs mois durant, à porter une bague de fiançailles sans envisager que j’allais me marier. D’ailleurs, si, voyant mon index, mon interlocuteur me demandait pour quand était le mariage, je répondais « mais de quel mariage tu parles ? ». J’étais fiancée et c’était bien assez.
Puis, j’ai eu un premier déclic. C’était un jour de confinement. Monsieur Lapin alignait des tableaux sur son jeu-vidéo-de-zombie, et je trainais sur les réseaux sociaux. Je suis tombée sur un article sur le mariage et, par curiosité, j’ai poursuivi mes lectures. Et là, tout s’est emballé. En trois heures, j’avais mon thème, mon DJ-coup-de-foudre, mon traiteur-coup-de-foudre, un budget détaillé, une liste de déco, un choix cornélien à faire entre deux nuances de vert pour les couleurs du mariage… Bref, j’avais ma nouvelle monomanie.
Mais est-ce que la fête du mariage parle vraiment de mariage ?
J’ai eu un second déclic. Cela est venu encore plus tard, à la suite d’un conflit familial qui m’a donné envie de tout annuler. Je te la fais courte : y’a des gens que tu es plus ou moins obligé d’inviter à ton mariage (sauf à être prêt à voir une moitié de famille débuter une guerre de plusieurs décennies), mais qui désapprouvent ton union et, plus particulièrement, qui te désapprouvent toi, dans l’union. Imaginer ces personnes, ce jour-là, mépriser chacune de tes préparations, ta robe, ta famille, ton existence, te donne l’envie que ce jour n’ait pas lieu. J’ai ruminé, ruminé, ruminé, à me rendre insomniaque.
Puis, j’en suis venue à l’essentiel. Monsieur Lapin va m’épouser et je vais l’épouser. Lui, depuis le départ prend très au sérieux son engagement auprès de moi. Je ne peux pas en attendre moins. Depuis, ce projet devient un point de fuite qui m’encourage quotidiennement à être quelqu’un de meilleure pour Monsieur Lapin mais aussi, et surtout, pour moi. Je veux être mon propre Lizarazu, c’est à cette condition que je peux également devenir le Zizou de Monsieur Lapin.
Ma Paillette, ma Chaussette, promis, promis, je t’embêterais beaucoup moins avec des considérations philosophiques par la suite ! Les prochaines fois, je te parle concret : les demandes (et le pourquoi du pluriel), la baaaaague, et tout une tonne de trucs bien love et plein de paillettes !
Et pour toi, ça signifie quoi le mariage ? Toi aussi, tu as vécu les fiançailles comme une période de transition, qui raconte finalement encore autre chose ?
Mlle Carpe
Quelle belle philosophie ! Je suis aussi team Roméo, c’est surtout bien pour s’envoyer en l’air xD (mais bon à 14 et 16 ans, on peut leur pardonner de ne pas avoir tout tout compris à la communication de couple).
J’ai hâte de voir la suite !
Ahah ! Si seulement je ne les avais trainé qu’à l’adolescence !
Ah mais j’adore tes comparaisons !! Je n’aurai jamais pensé que mon petit cul d’amour était un zizou et mon son lizzarazu 😂
Moi j’ai réalisé le vrai engagement du mariage 1 mois avant le mariage 😅 et la j’ai paniqué suis-je juste Juliette ?
Du coup, avec le recul, tu es juste une Juliette ?
Super ton article ! C’est un joli clin d’oeil car je pense publier un prochain article sur le thème des fiançailles. J’aime beaucoup tes pensées philosophiques ^^
Merci, j’avais peur que ce soit assommant !
HA HA HA HA HA « Les Roméo, c’est comme les trampolines. » HA HA HA HA HA HA HA j’aime tellement !!!! Je pense que ça va devenir ma référence de cette fin d’année ! HA HA HA !!!!
J’avoue, ça m’a bien fait marrer aussi !
Non mais Mlle Carpe, nouvelle fournisseuse d’expressions PARFAITES!!!!! Tu m’as tué à « les Roméo c’est comme les trampolines »!!!! Vivement la suite de tes aventures!!!
Quel bonheur de lire cet article où des réflexions profondes (si, si …) se mêlent à des images et expressions qui me font pleurer de rire! Donc je te rassure, tu n’es pas du tout assommante. Tu remets juste l’arbre au milieu de la forêt, et tu te penches sur l’essentiel. Parce que les paillettes, c’est bien, mais le mariage, au fond, ce sont plutôt les chaussettes (au fond du panier. Et dépareillées, toujours. Un mystère qui me dépasse…)
Merci Melle Carpe, j’aime beaucoup cet article philosophique, il fait rire et réfléchir!
Tellement hâte de lire tes prochaines chroniques 🙂